C comme Coquetière

Le 4 juin 1765, quand Anne Marie Mangenot épouse Michel Claude, l'acte de mariage précise qu'à Hatrize où elle se marie, en Lorraine, non loin de Metz, dans le bailliage de Briey, elle exerce la profession de "coquetière". Mais qu'est-ce donc ? 


Un coquetier est un marchand ambulant récoltant les produits frais (œufs et volailles) dans les fermes pour les revendre au marché. 

Mais c'est un métier souvent féminin. La marchande d'œuf est un sujet de tableau ou de gravure assez apprécié, plus ou moins réaliste. J'ai ainsi pu trouver cette représentation.

La rue Coquillère à Paris, dans le quartier des Halles, se serait d'abord appelée "rue Coquetière" car c'était là que se tenaient les marchands d'œufs qui arrivaient de toutes les provinces proches pour alimenter Paris. 


Rétif de la Bretonne, un auteur de la fin du XVIIIe siècle, présente des historiettes consacrées aux femmes exerçant de petits métiers dans un ouvrage intitulé Les Contemporaines communes

Il existe une nouvelle consacrée à "La Jolie Coquetière", une petite Fanchon, amie d'une fromagère et d'une beurrière, qui, à Paris, vend ses œufs dans la rue. Dans la fiction, on la découvre alors qu'elle chante une chanson un peu licencieuse, puis elle raconte une histoire farfelue de magie blanche qui l'aurait plus ou moins forcée à quitter sa famille. 

En tout cas, la marchande d'œufs est souvent l'objet de plaisanteries car elle doit faire attention à sa fragile marchandise... que les beaux parleurs comparent à sa vertu, forcément vulnérable...


Mais revenons à Anne Marie. Au moment de son mariage, elle a 34 ans. Sa mère est décédée 3 mois plus tôt et son père est mort aussi sans que je sache la date exacte. Elle dirige son petit commerce. Je la vois assez libre et entreprenante. Son mari est un personnage très intéressant qui méritera que je lui consacre par la suite un article. Il est veuf, il a 10 ans environ de plus qu'Anne Marie, et, après avoir bourlingué, il est revenu assez récemment dans sa région d'origine, la Lorraine. Il est natif de Norroy-le-Veneur et il occupe la fonction de garde-chasse et garde des bois du château de Tichémont, et demeure non loin dans une dépendance à Vallière. 



Il reste alors à imaginer le reste sur un mode plus romanesque et à recoudre les éléments qui manquent... Peut-on deviner qu'elle a été curieuse de rencontrer cet homme veuf qui revenait au pays ? A-t-elle profité de sa tournée pour venir livrer ses œufs au château et demander après lui ?.. Ils ne sont pas des gamins, ils savent ce qu'ils veulent et j'imagine deux forts caractères. Mais allez savoir... En tout cas, dans l'armée, le surnom de Michel, c'est "La Franchise". Et c'est peut-être un signe. 

Cette chromolithographie, image publicitaire en couleurs des débuts du XXe siècle, qui présente les costumes traditionnels de la région lorraine me fait penser à eux. J'imagine des œufs dans le panier (au lieu de mirabelles) et je le vois bien, lui, avec un lièvre attrapé avec un collet.

 J'espère qu'ils ont été aussi joyeux. 


Je suis une descendante à la 7e génération d'Anne Marie et Michel.

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si vous voulez lire en ligne le texte de Rétif, il commence ici à partir de la page 150.

[je précise que pour aller vite durant ce challenge, en espérant aller au bout, je ne note pas les références des images que j'insère et je ne m'assure pas des droits protégés. J'ai peu de lecteurs pour le moment, et il sera temps, à la fin du mois, d'ajouter les références que je sais indispensables]. 

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